Tails se redressa d’un seul coup, et se prit la tête entre les mains ; il venait de se réveiller. Il avait un mal de crâne épouvantable, comme s’il s’était fendu en deux.
« Pourquoi est-ce que j’ai encore fait ce rêve …? murmura-t-il, la voix éteinte. »
Il avait rêvé de ce moment, cet instant où il avait tout perdu. Le jour où Cosmo s’était sacrifiée. Cette vision l’avait hanté pendant des semaines, celles qui avaient suivies la dernière bataille contre les Métarex. Cela faisait un bon bout de temps qu’il croyait s’en être enfin débarrassé.
La douleur s’étant atténuée, le renard jeta un œil autour de lui. Il était dans sa chambre. Les murs étaient peints en jaune d’or, et quelques cadres en bois étaient accrochés aux murs. Les fenêtres étaient masquées par d’épais rideaux de la même couleur que les murs, et les rayons du soleil diffusaient une pâle lueur à l’intérieur de la petite pièce. A côté de son lit, il y avait une petite commode en bois, et aucun autre meuble. Le réveil indiquait huit heures et quart. Tails se leva difficilement, enfila ses chaussures et sortit de sa chambre sans même ouvrir les rideaux. C’était sa maison, enfin, la sienne et aussi celle de Cosmo. Avant de la connaître, il n’avait jamais beaucoup vécu dedans, car son atelier était sans doute l’endroit où il passait le plus clair de son temps. Cependant, à la suite des événements Mecha Sonic, la plante s’était retrouvée sans endroit où vivre. Alors Tails avait décidé de réaménager sa vieille bicoque, pour qu’ils puissent y habiter tous les deux.
Le renard avait quitté sa maison, il était à présent devant son atelier, qui était installé non loin. Il s’approcha de la grande porte principale, et saisit un code sur le terminal pour en commander l’ouverture. Elle s’ouvrit rapidement, laissant pénétrer la lumière à l’intérieur de l’installation. Tails entra, mais il reconnut alors une silhouette qui ne lui était pas inconnue.
« Hum, salut Miles, résonna une voix grave.
- Luke !? Mais comment … Qu’est-ce que tu fabriques ici ?
- Rien du tout, je ne sais même pas comment fonctionnent tes outils.
- Attends un peu, comment est-ce que tu es entré ?
- Faudrait apprendre à fermer les issues de secours à clé, la nuit … répondit le porc-épic d’un ton sarcastique.
- Ahem … Peut être … »
Le renard commanda l’ouverture du plafond du hangar pour illuminer l’intérieur, puis il revint vers Luke, qui était resté appuyé contre le mur, les bras croisés.
« Quel bon vent t’amène ?
- J’ai beaucoup réfléchi depuis hier, répondit l’amnésique. Mais j’ai aussi fait une étrange rencontre.
- Ah bon …?
- Tu connais ce « Knuckles », le gardien du caillou vert ?
- Knuckles ? Oh, ça fait très longtemps que je le connais. Et … par caillou vert, tu veux parler de l’Emeraude mère, c’est ça ?
- Oui, c’est comme ça qu’il l’appelle … J’aurais bien aimé en apprendre un peu plus sur cette pierre, mais apparemment, je n’ai pas été le bienvenu lorsque j’y suis allé.
- Knuckles n’a pas l’habitude de laisser n’importe qui s’approcher de l’Emeraude mère … Mais de là à repousser quelqu’un …
- Au fait, c’est quoi cette histoire de « tirer ses pouvoirs du cœur » ?
- Je suppose que même si tu avais ta mémoire, tu ne serais pas au courant … »
Tails raconta brièvement ce qu’étaient les Emeraudes du chaos, leurs pouvoirs et leurs particularités.
« Intéressant … laissa échapper le porc-épic à la fin du récit.
- Ca ne te dit rien ? Depuis que nous sommes partis dans l’espace pour les récupérer, il est possible que d’autres peuples soient au courant …
- Et bien, rien du tout. Si je connaissais l’histoire de ces émeraudes, je m’en serais rappelé … En tout cas, après être passé sur Angel Island, j’ai réfléchi au sujet des Crop Circles … J’ai la certitude que leur apparition ne peut pas être anodine, maintenant. Il faudrait les étudier directement sur le terrain.
- Bonne idée, de toute façon, cette histoire me met mal à l’aise. Si tu veux, on part tout de suite. »
A peine eut-il prononcé cette phrase qu’une sonnerie se fit entendre dans l’atelier. Tails se précipita vers son établi et se saisit d’un communicateur.
« Allô ? … Tiens, salut … Qu-quoi ? … Ok, j’arrive ! »
Tails appuya sur un petit bouton sur le côté de l’appareil.
« Miles ?
- Suis-moi ! »
Cream entendit des coups à la porte de sa maison. Elle sortit de sa chambre, dévala les escaliers, et alla ouvrir. C’était Tails. Ils se dirent bonjour, puis se précipitèrent directement là où la lapine était partie. Cosmo était assise sur le lit, éveillée, le visage entre les mains. Vanilla était à côté d’elle.
« Cosmo …
- TAILS ! »
Elle leva la tête. Ses yeux étaient redevenus normaux. A peine eut-elle aperçut le renard qu’elle se leva et alla littéralement se jeter dans ses bras. Des larmes ruisselaient le long de ses joues.
« J’ai rêvé qu’il te tuait … sanglota-t-elle en le serrant encore plus fort contre elle. J’ai rêvé qu’il vous tuait tous …
- C’est fini, Cosmo … la rassura Tails en la serrant en retour. Ce n’était qu’un cauchemar …
- Tails … Ce … ce n’est pas aussi simple … murmura-t-elle, abattue.
- Cosmo, tu n’as pas dû vivre quelque chose de très joyeux, déclara Vanilla en se levant. Tu devrais te reposer un peu, le temps de t’en remettre.
- Non, il faut que je vous en parle au plus vite, répondit-elle en lâchant Tails, le regard baissé.
- Tu es sûre que ça va aller, Cosmo ? demanda Cream.
- Ne t’en fais pas pour moi.
- Alors … qu’est-ce que tu as vu ? »
La plante ferma les yeux quelques secondes, la tête penchée vers le sol. Puis, elle se redressa et les regarda d’un air grave.
« Ma mère … elle m’en avait parlé … déclara-t-elle.
- TA MERE ??? s’écrièrent-ils tous les trois à l’unisson. »
( ♫ ) « C’était il y a très longtemps … Je devais avoir six ou sept ans. A l’époque où notre vaisseau voyageait encore dans l’espace en essayant d’échapper aux Métarex. Hertia, ma mère, était alors passée à l’âge adulte, et était donc devenue un arbre. Elle était aussi directement reliée au système de navigation du vaisseau, et c’était notre mère à toutes. Je lui rendais visite chaque jour avec ma grande sœur Galaxina. Et à chaque fois, elle nous racontait des histoires de notre peuple et de sa gloire passée … toujours en esquivant le rapport qu’avaient les Métarex avec nous. Et une fois, elle eut l’air plus grave que d’habitude, bien que ce fut un sujet n’ayant rien à voir avec nos ennemis. J’entends encore ses paroles résonner dans ma tête …
« Il faut que je vous avertisse d’une chose, mes enfants, avait-elle dit. Dans la galaxie, il existait autrefois des êtres encore plus puissants et cruels que les Métarex eux-mêmes. C’étaient des créatures impitoyables qui ont aujourd’hui disparues, mortes ou qui se terrent dans les endroits les plus sombres et reculés de l’univers. Auparavant, nous étions en guerre contre eux … une guerre qui avait concerné toute la galaxie. Au terme de cette guerre, nous les avions vaincus. Mais cela a coûté très cher : notre planète est morte à cause du conflit. Nous sommes donc partis dans l’espace à la recherche d’une terre nouvelle … »
Maintenant, je sais qu’elle avait menti, ou plutôt qu’elle nous avait caché la vérité. Comme vous le savez, ce sont les mâles de mon espèce, les Seedrians, qui étaient devenus les Métarex. Et c’étaient eux les responsables de la mort de notre planète. Tous voulaient vaincre une bonne fois pour toute la race qui était en guerre contre nous … Et ils y sont parvenus, en exploitant l’énergie du cœur de la planète. Vous connaissez la suite. »
Cosmo venait apparemment de finir son récit. Tous la regardaient d’un air à la fois perplexe et triste. Quelques secondes de silence s’écoulèrent, puis Cream prit la parole.
« Et ? Alors ?
- …
- Cosmo, qu’est-ce qu’elle a dit ensuite ?
- Je … Je … Oh non, c’est pas possible ! J’ai oublié !
- QUOI ??? s’exclamèrent-ils tous.
- Je ne me souviens plus exactement, mais il y avait quelque chose au sujet des visions … Mais je n’ai aucune idée … Et … Oh, je ne sais même plus si ça avait un rapport avec ça … Je suis désolée …
- Ce n’est pas grave, assura Tails. L’essentiel, c’est que tu ailles bien.
- On était vraiment inquiets pour toi, raconta Cream. Tu es restée comme ça pendant deux jours.
- Deux jours ?!
- Mais il y a quelque chose de bizarre … avant-hier soir, tu t’es réveillée une fois.
- Je ne m’en souviens pas …
- Et à ce moment là, tu as parlé de quelqu’un qui aurait tué quelqu’un d’autre … »
Des larmes apparurent sur le visage de la plante.
« Ca doit être le moment où … j’ai vu Tails se faire tuer.
- Tu m’as vu … quoi ? demanda le renard en hoquetant.
- Tails … te voir mourir sous mes yeux … te voir tomber par terre, sans vie … c’était … »
Elle n’arriva pas à finir sa phrase, tellement elle était secouée par le chagrin.
« Cosmo, je ne te laisserai jamais seule … Je te le promets.
- Tails …
- Mais … Il y a un truc qui m’échappe encore, déclara-t-il. Qui me tuait dans ton rêve ? »
La plante resta silencieuse quelques instants. Elle déclara finalement :
« Il était … flou … Je ne me rappelle plus exactement à quoi il ressemblait, mais j’avais l’horrible impression de le connaître … »
Quelques minutes plus tard … Les trois amis étaient redescendus au rez-de-chaussée. La plante s’était un peu remise de sa douloureuse expérience, après avoir bu un verre d’eau.
« Cream, Cosmo, il y a quelqu’un que j’aimerais vous présenter, déclara Tails.
- Qui est-ce ? demanda la lapine.
- Venez, vous verrez par vous-même. »
Le renard entraîna ses amies vers la porte d’entrée, qu’il ouvrit.
« T’en as mis du temps, Miles, grogna Luke. »
Le porc-épic était appuyé sur le mur à droite de la porte, les bras croisés et les yeux clos.
« Je vous présente Luke, annonça Tails. Et Luke, je te présente Cream et Cosmo.
- Enchanté, répondit l’épineux sans bouger d’un pouce, dont le ton laissait clairement transparaître son indifférence.
- Ravie de te rencontrer, Luke ! déclara poliment la lapine. Tails m’a parlé de toi.
- Très bien, ça m’évitera de tout répéter depuis le début, répondit-il avec sa froideur habituelle. »
Il daigna finalement ouvrir les yeux, tourna la tête vers les trois hybrides devant la porte et résuma brièvement sa situation. Cela intriguait profondément Cream, mais pas autant que Cosmo, qui elle, n’était pas du tout au courant.
« J’essaye de récolter le plus d’indices possibles sur mon passé. Aussi, j’aimerais savoir à peu près quel genre de vision tu as eu, Cosmo. C’est peut-être important, termina-t-il sur son éternel ton neutre. »
La plante acquiesça, et raconta à son tour les évènements qui s’étaient déroulés dans ses rêves. C’était juste une suite de morts lugubre, de gens tués par un mystérieux bourreau, de souffrances et de craintes. Le plus inquiétant, c’était que toutes les personnes qu’elle connaissait y laissaient la vie. L’expression si impassible de Luke prit soudain une pâleur blême à la fin du récit.
« Ce … ce n’était tout de même pas moi l’auteur de tous ces crimes !? demanda-t-il en se décollant du mur. »
Cosmo l’examina longuement, mais s’arrêta au niveau de la tête.
« Non, il n’avait pas ce genre d’épines … Je n’ai pu voir de lui qu’une silhouette, mais c’est suffisant pour dire qu’il ne te ressemblait pas.
- Ca me rassure … souffla le porc-épic. La théorie que ce soit moi le tueur était assez séduisante … Cela aurait peut-être expliqué pas mal de choses, mais heureusement ce n’est pas le cas. Quoi qu’il en soit, je dois vous laisser. Je vais réfléchir à tout ça.
- Attends ! le coupa Cream. Tu ne veux pas prendre le thé avec nous ?
- Je n’ai pas le temps pour ces bêtises, répliqua-t-il sèchement. »
Il partit dans la direction opposée à la maison de la lapine, mais Tails le rejoignit et l’arrêta.
« Prends ceci, Luke. Ca te permettra de me contacter si tu as besoin d’aide. »
Il lui donna une petite montre jaune au cadran rectangulaire, sur lequel était affichée une image de parasites, et lui expliqua comment elle fonctionnait. Elle était capable de faire office de communicateur, ainsi ils pourraient se joindre en cas de problème. Le porc-épic le remercia et lui précisa : « Je t’appellerai bientôt pour qu’on parte étudier les cercles. » avant de repartir vers l’intérieur des terres.
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