L’énorme ptérodactyle se retourna sur le champ, tentant de ne pas rayer le sol avec sa queue, en reconnaissant la voix de celui à qui il devait la vie, le pouvoir, la puissance et l’intelligence. Pendant qu’il était retourné, regardant ses plans se réaliser devant ses yeux, il n’avait pas prêté attention à l’holotransmetteur situé à la droite de son trône. Une silhouette bleue s’affichait au centre des deux sphères qui géraient l’hologramme, l’une située au plafond de la pièce, l’autre au sol.
- Maître…annonça Phi en s’agenouillant respectueusement face à son interlocuteur virtuel. Il ne pouvait d’ailleurs en être qu’ainsi.
- J’ai cru entendre que votre mission était une réussite. J’aimerais maintenant que vous me fassiez une explication plus détaillée. Vous êtes déjà venu me rendre compte en personne que les grandes têtes pensantes corrompues et le premier raid contre Mobius étaient couronnés de succès. Qu’avez-vous fait depuis ? Avez-vous bien suivi mes directives ?
- Bien entendu, votre majesté. Comme vous nous l’aviez demandé, nous avons placé des masses importantes de Phazon dans le Tertyyum, et avons envoyés la poudre produite sur la planète. D’après nos premières observations, les nuages qui en ont résulté ont réussi à terrifier la population sans aucun problème. Votre prise de pouvoir sera encore une fois aisée, mon Seigneur.
- Je l’espère bien. De toutes façon, personne n’a osé nous résister jusqu’à présent, ce n’est pas cette petite planète primitive qui nous arrêtera.
- Monseigneur, puis-je vous parler de…
- Du fait que sur cette planète vit une bande de héros quelconque ? Vous avez vous-même corrompu leur plus grand ennemi et l’un d’eux, ils ne pourront rien faire. Une fois les résistants écartés définitivement, passez à l’attaque. Nous avons opéré pareillement pour la quasi-totalité des autres planètes, et leurs soi-disant « protecteurs »n’ont eus aucune chance .
- Oui, Monseigneur. Mais il se passe quelque chose qui ne m’a pas plu…nous avons perdu le contact avec l’échidné éclaireur que nous avions envoyé pour commencer notre mission. Il a, conformément à nos ordres, anéanti une grande partie des forces armées du pays phare de Mobius, mais depuis, nous l’avons perdu et ne captons plus sa signature de Phazon…
- Général Phi Ridley…je croyais que tout s’était passé sans problème. Alors pourquoi ne m’avez-vous pas fait savoir que vous aviez perdu le contact avec un élément tel que lui ?!! Termina l’être, haussant a voix à chaque mot que sa voix glaciale prononçait.
- Maître…je suis désolé, nous ne l’avons remarqué que tardivement…s’excusa Phi, d’une voix légèrement étranglées. De toutes façon, l’attaque sera un succès total. Il ne reste que quatre jours, et la planète est très mal défendue, leurs seuls vaisseaux sont primitifs, et rien ne peut briser un Léviathan…
- Vous oubliez le plasma en hyperfusion, mon ami. Vous me décevez de plus en plus. Peut-être devrais-je vous faire remplacer… ? Peut-être votre frère Iota Ridley pourra-t-il m’aider de manière plus efficace ?
- Maître, non ! Je vous en supplie, je ne commettrai plus d’erreurs à l’avenir, déglutit Phi Ridley. Je vous jure que cette opération sera couronnée de succès…et Mobius ne possède pas de telles armes, ils ne pourront rien faire !
- Je l’espère bien…dans votre intérêt…
Et la silhouette fantomatique disparut dans un nuage sombre. Phi avait beau ne pas être seul dans la salle du trône, des scientifiques travaillant généralement sous ses yeux, adossés à leurs fauteuils aux murs de la salle, travaillant sur leurs puissants ordinateurs, le silence était total. A la fois parce qu’aucun Twyllord n’aurait jamais osé déranger une conversation entre le seigneur Phi Ridley et leur maître, mais aussi parce que ce genre de discussions ne mène en général qu’à de longs instants de réflexion de la part de Phi.
L’énorme ptérodactyle se releva, lentement. Il ne supportait pas qu’on le traite ainsi, même de la part d’un être aussi puissant. Il avait un certain honneur, une certaine fierté personnelle, et il détestait qu’on y touche. Les scientifiques avaient recommencé à travailler, sans doute pour éviter que Phi ne leur tombe dessus en train de zieuter vers les conversations de leur chef.
- L’opération sera un succès, Maître. Marmonna-t-il, avant de passer la porte de son immense salle du trône. Je vous le promets…
Après être sorti de la pièce, il se retrouva dans un couloir fait à sa mesure, plutôt large et haut, aux murs noirs parcourus de traits bleus, et un sol en damier argenté. Il n’y avait que quelques rares vitres allongées sur les murs, servant plus comme des postes d’observation.
Le ptérodactyle s’avança, passant de temps à autre devant une porte. Il marchait soit à quatre pattes, soit debout. La façon lui importait peu du moment qu’il avançait. Il atteignit alors une porte située sur sa gauche, et d’une pression de la main sur un quelconque scanneur digital qui reconnaît vos doigts, il passa le seuil. Il parvint ainsi dans une toute petite salle, juste assez grande pour l’accueillir. Un autre scanneur digital se situait sur le mur de cette pièce.
Après une pression de sa main, et choix sur un petit damier numérique du chiffre trois, le sol se mit en mouvement, et l’ascenseur descendit dans la tour qui servait à relier les quartiers généraux au reste du croiseur, le tout devant une longue baie vitrée tout en hauteur, d’où l’on pouvait à nouveau voir Mobius de loin, et le reste ne semblait qu’un immense tas noir couvert d’étoiles scintillantes.
Lorsque la plate-forme d’ascenseur s’arrêta en douceur à l’étage sélectionné, Phi Ridley s’avança dans la pièce qui se révélait devant lui. Des dizaines de Twyllords s’affairaient à leur tâches quotidiennes, réglages, mécanique, entretien des armes, balayage et on en passe. À la vue de leur général pénétrant dans leur lieu de travail, ils adoptèrent des poses plus respectueuses et l’un d’eux accéléra son mouvement de frottement sur son blaster à injection. Mais aucun d’eux n’intéressait en ce moment le dragon. Il traversa la pièce, passa dans une autre, et encore une autre. Finalement, il atteignit ce qu’il cherchait tant à voir. Une machine aussi haute que trois humains et large comme six, c’était le Lythium.
Cette énorme machine, noire comme de l’encre, divers tuyaux et systèmes par ci par là, un bruit régulier mais pas gênant, servait en réalité à la production des nuages qui terrorisaient la planète en contrebas.
L’on versait sous forme liquide ou solide du Phazon à l’intérieur d’un trou du Lythium, et qui après quoi était d’abord chauffé à des températures extrêmes, réchauffant également les masses liquides, on broyait ensuite tout le minerai, et on en tirait une poudre plus fine que du sable. Cette poudre était placée dans des capsules que l’on envoyait alors vers la planète visée, et qui, une fois l’atmosphère atteinte, s’ouvraient et libéraient cette poudre. Au contact de l’air, ces fins grains se dilataient d’une manière impressionnante et créaient des nuages de ténèbres. On répétait l’opération un peu partout autour de la planète, et le tour était joué.
C’était ainsi qu’on pouvait établir la tactique de l’Empire. On terrorise d’abord, on attend que le peuple vous supplie d’arrêter ça, on mène une attaque de temps en temps pour mettre la pression, on corrompt séparément certains habitants, généralement les dirigeants ou esprits scientifiques, on attend encore, et on envoie un Léviathan pour corrompre la planète elle-même un peu plus tard, profitant du fait que les habitants ne fassent plus attention à rien et ne puisse repousser l’offensive du météore. Une semaine, voire au pire un mois, suffisaient à produire ce genre de résultat.
- Caporal, demanda Phi en s’approchant d’un Twyllord un poil plus grand que la moyenne, et au bras duquel on pouvait apercevoir des galons argentés, signe de son grade. Les réserves de Phazon suffisent-elles ? Il me semble que la couche nuageuse a tendance à laisser des trous à divers endroits…
- Général, annonça le Twyllord en se retournant et en s’agenouillant. Mes excuses pour ce dilemme. Nous avons largement assez de Phazon pour maintenir la planète sous régime constant pendant des mois, seulement je pensais à en écono…
Il ne put terminer sa phrase. Le poing immense du ptérodactyle s’était refermé sur lui, une griffe juste sous la gorge, le soulevant du sol avant de le plaquer brutalement sur un mur. Il suffoqua.
- Si vous avez de quoi alimenter le Lythium, alimentez-le, c’est un ordre ! cracha Phi d’un ton brutal. Je ne veux pas que par votre faute, la prise de Mobius soit un échec. Est-ce clair ?
- Oui…mons…eigneur…je ne vous…décevrai plus…
- J’ose l’espérer. Sinon ce n’est pas face à moi mais à l’Empereur lui-même que vous devrez en rendre compte. Et il est loin d’être aussi indulgent que moi…
Le Twyllord retomba sur le sol d’une hauteur d’au moins trois mètres. Fort heureusement, son armure amortit le choc. Après s’être douloureusement relevé, il ordonna à trois soldats situés derrière la machine de fournir en Phazon la machine, en masse plus conséquentes encore que d’habitude.
Phi, lui, avait tourné le dos et était reparti sans un mot ou un regard, juste sa queue balayant le sol sombre et produisant un léger crissement.
Sa mauvaise humeur était due à sa conversation récente avec son maître. Il ne tenait pas à le décevoir. Toutefois, ses paroles étaient justes en un sens : L’Empereur était tout sauf quelqu’un d’indulgent, et la mort de plusieurs de ses propres officiers par sa main en était la preuve.
Sonic observait le village éclairé dans la nuit, perché au sommet d’une petite colline rocheuse. Il avait abaissé le capuchon de sa cape de voyage, posé un genou en terre, le tout donnant involontairement une scène très belle, si on comptait encore le décor qui était principalement une forêt de pins noirs, avec comme seul élément gênant la présence des nuages dans le ciel, cachant les étoiles et le disque lunaire. De jour comme de nuit, la météo était ténébreuse, désormais.
- Sonic, tu es prêt ? demanda une voix derrière lui.
Le hérisson se retourna. La petite troupe s’était installée à l’entrée dune grotte, située sur le sommet de la colline. Un feu crépitait au centre de la grotte, au milieu des sacs de couchage et de Tails, Amy et Knuckles. Ils étaient irrepérables depuis le ciel, ou depuis le village situé à environ un kilomètre en contrebas du pied de la colline. Le feu présentait peut-être des risques, mais c’était ça ou mourir de froid. Descendus plus au sud, l’air devenait plus froid, surtout la nuit où la barre du zéro négatif pouvait être franchie.
- Ouais, ça devrait aller, répondit le hérisson bleu en s’adressant à Tails. La nuit, il avait beau être moins facile à repérer, il prenait quand même ses précautions, et que le village était assez éclairé.
- Tu as la liste, l’argent, ça devrait aller, dit le renard. Soit quand même prudent, on ne sait jamais, les G.U.N. patrouillent peut-être dans la zone…
- Ne t’en fais pas, ça ira. Dit-il en lui adressant un clin d’œil qui se voulait rassurant.
Et d’un bond, il franchit les quelque dix mètres qui le séparaient du sol en contrebas, se reçut avec aisance et se mit à marcher. Pas trop vite, pas trop lentement, les risques étaient grands. Arrivé sur un petit chemin, il mit sa capuche, dissimulant ainsi une partie de son visage et ses célèbres pics. Plus loin, le sentier terreux rejoignit une petite route. Par chance, il n’y eut aucune voiture qui passa par là ce soir-là. C’était sans doute un bled bien paumé.
À l’entrée du village, Sonic vit un écriteau un peu rouillé et cabossé sur lequel on pouvait tout de même facilement distinguer un message : « Bienvenue à Losse-en-Gelaisse. »
- M’okay, voyons voir…marmonna le hérisson en sortant sa liste de courses. Tails lui avait donné un récapitulatif des fournitures à acheter, d’un poil de matériel, et assez de rings pour acheter trois fois ce dont ils avaient besoin. Viande, eau, riz…
Il s’avança donc dans ce qui semblait être la rue principale. Pas très grand, comme coin, mais on y trouvait quelque boutiques sympathiquement décorées, une place centrale avec un monument aux morts, une église, une école, une petite mairie, et tout le tralala nécessaire au fonctionnement d’un village tel que celui-ci. Le hérisson commença sa tournée en passant par un petit supermarché, faiblement éclairé, mais à l’ambiance qui semblait pourtant assez joyeuse. Quelques clients vagabonds traînaient dans les rayons, la caissière, assez menue, trônait derrière son comptoir, entourée par des affiches publicitaires pour un concert.
S’assurant que ses pics étaient bien dissimulés et que le bas de la cape l’entourait totalement, priant pour que sa petite taille n’éveille pas les soupçons, Sonic s’avança, poussant la porte d’entrée qui produisit un léger tintement.
- Bonsoir, annonça la caissière en lui jetant un œil distrait.
- ‘Soir, répondit Sonic d’une voix neutre, avançant vite dans un quelconque rayon où il n’y avait personne.
- Alors, pensa-t-il. Viande, céréales, Riz, Lait, Riz de lait, allumettes,…
En moins de cinq minutes, il avait rassemblé toute la nourriture dont il avait besoin, le tout sans se faire remarquer. Lorsqu’il s’approcha de la caissière, elle commença avec une voix mielleuse :
- Ce sera tout ?
- M’oui, répondit Sonic.
Il espérait juste avoir le visage assez dissimulé pour ne pas être reconnu. Tandis que la dame pesait le tout et regardait ce qu’il avait pris, le hérisson regarda derrière elle, évitant de croiser le regard de son interlocutrice qui se faisait de plus en plus curieux.
Il sentit son estomac descendre dans ses chaussettes lorsqu’il aperçut une affiche représentant quatre personnes : Lui, Tails, Amy et Knuckles. On pouvait lire en dessous : « Dangereux criminel accompagné de trois complices. À retrouver, morts ou vifs. Quiconque détiendrait des informations permettant la capture de ces fugitifs est prié de les communiquer au plus vite aux centres d’informations des Gardiens Unis des Nations. Récompense de 2 000 000 de Rings. »
À la vue de cette récompense presque exorbitante, il comprit que quelque chose avait vraiment dû influencer les autorités. Selon ses souvenirs, personne encore n’avait eu droit à un prix aussi élevé, même s’ils étaient quatre.
- Et voilà, ça nous fera 50 rings, mon garçon, annonça la caissière en posant son sac sur le comptoir.
- Merci, au revoir, marmonna-t-il en déposant la somme demandé dans sa main, tournant le dos et sortant le plus vite possible sans courir, histoire de se fondre dans la nuit.
La porte produisit de nouveau son bruit de carillon, et Sonic se retrouva dans l‘air glacial de la nuit. Il avança à un pas normal, son sac sur le dos, se dirigeant cette fois vers la sortie du village. En levant les yeux, il ne vit aucune étoile vraiment brillante, même la lune semblait plus sombre que d’habitude.
- Foutus nuages, songea-t-il.
- Tu ne devrais pas dire ça…marmonna une voix dans une ruelle sombre qu’il venait de dépasser.
Vif comme le vent, le hérisson se retourna et bondit en arrière pour regarder dans l’étroit passage, tous ses sens en alerte.
Il y vit, dissimulé à moitié dans l’ombre, quelque chose qui ressemblait à un hybride noir. Mais ce n’était pas Shadow, ce n’était pas son physique…
- Qui est-tu ? Demanda le hérisson, intrigué.
- Un soldat comme un autre, répondit l’ombre.
Sonic sentit ses entrailles se nouer. Les Fédéraux engageaient des hybrides autres que les chauve-souris, maintenant ?
- Sois plus précis, lança le hérisson.
- Celui qui va te rallier à la noble cause que nous poursuivons…
- La quoi ?
Tout se passa rapidement. L’être sombre sortit de son dos une arme qui ressemblait à un revolver de gros calibre, le pointa sur Sonic et enfonça la gâchette, libérant un tir de rayon bleu assez petit mais d’une vitesse inouïe. L’hybride bleu se jeta au sol en roulant pour éviter le coup qui effleura l’un de ses piquants, lui laissant une brûlure cuisante.
- Argh ! Mais qu’est-ce que…
Il n’eut pas le temps de continuer. Un deuxième tir volait déjà dans sa direction. Il roula une nouvelle fois, priant pour que le bruit que faisait l’arme de son ennemi ne rameute pas les G.U.N qui patrouillaient dans le village et dans les alentours. Le rayon laissa un petit trou cramoisi dans l’asphalte de la route. Cette fois, Sonic eut assez de temps pour se relever avant que n’arrive un troisième tir.
Il le vit alors clairement. Son ennemi avait bien la forme d’un hybride, mais il dépassait le mètre trente sans problème. Il portait ce qui semblait être une amure noire teintée de bleu, et un casque doté de trois pics qui rappelaient désagréablement au hérisson ceux de son double mécanique Metal Sonic. Pour finir, deux lames noires remontaient depuis ses épaules pour terminer un peu au-dessus de sa tête.
C’était tout ce qu’il put apercevoir avant qu’un troisième tir ne file dans sa direction, visant son cœur. Mais cette fois, il passa lui aussi à l’attaque. Sautant pour éviter le trait de lumière, il se retrouva à plusieurs mètres de hauteur.
- « C’est l’occasion ou jamais », pensa-t-il.
Et il se lança en boule à pleine vitesse, usant de sa puissante homing attack pour frapper le soldat en armure. Mais ce dernier semblait posséder de bons réflexes, et croisa les bras devant lui pour parer le coup. Lorsque le projectile vivant le toucha, il recula de plusieurs mètres en laissant des traces sur le sol.
Mais non content de n’avoir presque rien subi, hormis de légers dommages sur ses avant-bras, son ennemi écarta les bras violemment, repoussant la boule bleue supersonique.
Le hérisson atterrit assez lourdement sur le sol. Il n’avait en rien prévu une telle puissance musculaire chez cet ennemi. D’habitude, il lui suffisait d’une seule homing attack pour détruire même un robot assez avancé…
- Qui est-tu ? Lança-t-il une dernière fois.
- Ta dernière vision de liberté ! Hurla l’adversaire en tirant vers le torse du hérisson.