Hello tout le monde ! Aujourd'hui est un grand jour... Car je vous offre enfin le rapport n°5 ! Avouez, faut le faire ! Avouez que vous n'y croyiez plus, tant l'attente fut longue !
*On lui envoie des carottes et des patates en guise de cadeau d'anniv. Ca a le mérite d'être original, songea la roussette noire et feu en se relevant, une peau de banane sur la tête*
Et c'est grâce à vous tous si j'ai pu entrer si tôt dans le best-of, en plus alors que j'y croyais même pas ! C'est un honneur immense, je ne vous remercierai jamais assez de vos critiques et encouragements. Sincèrement, je vous mérite pas.
*Elle part s'enterrer*
Allez, trève de bavardages. Voici le rapport que vous n'attendiez plus :'D En plus il se passe rien ! Mais les rapports suivants se feront moins attendre, et ça va commencer à bouger sérieusement dans le labo. Je ne pense pas excéder les 20 rapports sur cette fic.
Rapport V - Conscience
Alidann se réveilla lentement. Il vit d'abord le visage de Tommie, tout près de lui. Son ours en peluche, qu'il n'avait pas lâché de la nuit. Il avait fait de bien mauvais rêves... Avec un oeil rose pétrifiant, et du sang qui sortait de nulle part. Tout tremblotant, il se redressa et attrapa un gilet sur une chaise posée à proximité. Il l'enfila hâtivement, descendit de son lit, enfila ses chaussons et se présenta devant la glace. En effet, il avait une bien petite mine. Il tenta d'arranger un peu sa chevelure dense, avant d'aller errer quelque part dans le bâtiment. Il s'habilla à la va-vite, puis s'en alla quelques minutes dans sa salle de bain personnelle, directement reliée à sa chambre. Il se mit de l'eau sur le visage, et s'étira longuement. Il n'y avait qu'un lavabo, une douche et des toilettes, mais cela lui suffisait amplement. Même s'il regrettait toujours son ancienne vie.
Il ne pouvait le nier : en ce jour, il ne manquait de rien. Il avait tout pour mener une vie heureuse et sans souci, mis à part sa crainte quant à son avenir. Comment échapper à la destinée que son père avait entrepris de tracer pour lui ?
- Je lui ai rien demandé... maugréa-t-il pour lui-même avant de quitter sa chambre à grands pas.
Elle mit du temps à reprendre conscience. D'abord, elle sut qu'un voile noir embrumait ses souvenirs, qu'il lui fallait ouvrir les yeux, que quelque chose s'était passé. Elle sentait son petit corps, toujours le même, dans lequel elle était toujours enfermée. Ses doigts, qu'elle pouvait à peine faire remuer, ses deux jambes, de même immobilisées.
Elle ouvrit soudainement les paupières.
Mais le voile noire ne partait pas. Il restait là, partout, devant ses yeux encore fatigués et perdus. Elle poussa un petit gémissement. En retour, elle entendit vaguement des voix se rapprocher d'elle, comme paniquées :
- Eh, elle se réveille !
- Ses piques sont bien immobilisés ?
- Faites attention, ne restez pas trop près d'elle ! Elle est dangereuse !
Chaque mot résonnait à ses oreilles, chaque syllabe, chaque son... Elle les répéta dans sa mémoire. Et tenta de se calmer. Elle ne pouvait rien faire, une fois de plus... Elle tenta de rassembler son énergie spirituelle, et les liens qui la retenaient prisonnière se mirent à vibrer légèrement. Quelque part, dans le monde de ceux qui ont la vue, les voix s'affolèrent.
- Elle tente de s'enfuir !
- Un somnifère, vite !
- Où est Shutarô ?! Appelez-le immédiatement !
Les voix se chevauchaient toutes, cette fois. Pas moyen de détacher les mots pour construire un sens. Désespérée, elle détendit son corps, relâcha son étreinte mentale, abandonna sa résistance vaine. Les voix se turent alors. Que devait elle faire, alors ? Les gestes à faire étaient-ils ceux qui faisaient taire les voix, ou ceux qui les faisaient parler et s'agiter ?
Elle expira profondément, et ne pouvait toujours pas faire bouger cette visière qui l'empêchait de voir. Alors, elle répéta les mots des scientifiques dans son esprit. Tant qu'elle restait consciente.
Alidann n'avait pas de leçon aujourd'hui. C'était pour lui un jour de repos, et son professeur particulier était parti s'occuper du laboratoire, avec tous les autres hommes en blouse blanche. Depuis qu'il était entré au laboratoire, à ses sept ans et au décès de sa mère, on avait commencé à l'instruire. Il apprenait par coeur les éléments chimiques, leur nom aussi bien que leur structure, leur forme dans l'espace. Il apprenait les formules de chimie, les calculs, la géométrie, de la physique. On lui enseignait tout le savoir qui le mènerait à ce destin de scientifique qu'il tentait pourtant de fuir, depuis que sa mère l'avait quitté.
Il était dix heures du matin, le soleil s'élevait dans un ciel dégagé. Alidann sortit du laboratoire par une passerelle qui le conduisait sur le toit d'un des bâtiments. C'était un endroit qu'il affectionnait particulièrement, car seul le vent faisait vibrer ses tympans, et l'odeur des médicaments étranges était remplacée par celle de l'air pur. Il s'assit comme à son habitude sur la grande plate-forme blanche. Les genoux serrés, près de son visage. Il faisait un peu froid, ce matin-là. Il regarda les arbres s'étendre devant lui, et, tout en bas, très loin, il apercevait les maisons paisibles du village mobien. Le fleuve Tirah, à sa gauche, qui descendait jusqu'entre les huttes de pierres et de briques. Il ne voyait pas la plage, dissimulée dans un voile de brume. Un coup de vent passa et il frémit légèrement. Mais rapidement, le soleil perça les nuages de ses rayons chauds et vint arroser le laboratoire d'une douce lumière.
Il trouva alors le courage de sourire.
- Alidann, que fais-tu ici ?
Le jeune garçon sursauta et se retourna brusquement. Son sourire fondit en un clin d'oeil. Son père, Shutarô. Il l'avait rejoint sur le toit. Lentement, Alidann détourna le regard et se remit dans sa position initiale, pour continuer d'observer le paysage comme si de rien n'était. Un silence plana quelques instants. Silence durant lequel Alidann fixait toujours l'horizon, impassible, et Shutarô regardait son fils, avec un mélange de tristesse et de colère. De colère, envers lui-même. Envers lui-même qui n'avait pas été capable d'élever son fils correctement, d'en faire un petit garçon heureux, de lui donner envie de se consacrer corps et âme à ses études au laboratoire ; dans le seul et unique but convoité d'atteindre un jour la réputation, et le talent de son père.
Mais cette vie idyllique n'était pas la leur. La triste réalité, elle, savait leur remettre les pieds sur Mobius : elle les enfermait à nouveau sur cet archipel où était née la terrible infection du Tetrix ; avec ces mobiens qui se mouraient jour après jour. La plus jeune génération était la plus touchée ; ce qui était un grave danger pour le futur du petit village. Il fallait faire quelque chose. Il fallait agir. Et cela, Alidann ne le comprenait-il pas ? Pourquoi rejetait-il tant le métier de scientifique, alors que tout ce que lui avait montré son père était la richesse de la connaissance, la protection de tous et la bonté du coeur ?
Tout ce qu'il lui avait montré... Finalement, Shutarô se disait qu'il n'avait pas eu que des bons exemples à l'égard de son jeune garçon.
- Alidann... risqua le scientifique, tête basse. Est-ce que tout va bien ?
Un nouveau silence. Shutarô s'en doutait, mais se maudit malgré tout ; il n'avait jamais eu les mots pour parler à son fils.
- Alidann, tenta à nouveau Shutarô, j'ai besoin que tu me parles. Pourquoi n'essayes-tu pas de me dire ce que tu as sur le coeur ? Je t'écouterai toujours, tu sais ?
- ... Tu sais déjà tout ce que j'ai sur le coeur, répliqua alors Alidann d'une petite voix, sans daigner se retourner ni changer de position. Et puis, j'ai rien à te dire.
Ca avait le mérite d'être clair. Froid et douloureux, mais clair.
- Ecoute, je sais que je n'ai pas toujours été celui qu'il te fallait en tant que père, et que bien souvent j'ai commis des erreurs. Mais tu dois essayer de me comprendre. Moi, je ne fais que ça, essayer de te comprendre.
Alidann ne répondit pas mais baissa les yeux. Il ne sut pas pourquoi, mais ces paroles l'avaient légèrement adouci. C'est vrai que c'était son père, cet homme derrière lui. Celui qui avait contribué à sa naissance, mais qui avait abandonné l'autre responsable... sa mère, Marina. Et ça, il ne le pardonnerait jamais.
- Alidann, reprit Shutarô en avançant à petits pas vers son fils. Cessons de nous quereller ainsi, ça ne nous mènera nulle part, et ça ne sauvera pas l'archipel.
Il allait déposer une épaule sur l'épaule d'Alidann qui se releva brusquement, et regardant son père avec colère, il cria :
- Et maman, tu l'as sauvée, elle ?!
Sentant les larmes de l'échec monter à ses yeux, il esquiva son père et courut vers le bâtiment, pour disparaître de nouveau à l'intérieur, laissant le scientifique seul sur le toit.
Shuratô regarda longuement la porte par laquelle son fils avait disparu. Au fond, Marina était à elle seule la source de toute la haine que son fils éprouvait envers lui. Et un jour peut-être, Alidann comprendrait, peut-être malgré lui, pourquoi les événements s'étaient déroulés ainsi. Il comprendrait la raison de cet "abandon", dont il parlait sans même le connaître.
Bientôt peut-être, il comprendrait pourquoi Marina était morte, ensevelie et étouffée dans le désespoir.